Pour une gestion responsable des équipements sportifs !
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Gymnases, piscines, cours de tennis, petits et grands stades… Les communes jouent un rôle incontournable dans l’offre sportive locale. En France, elles sont propriétaires des trois quarts environ des équipements sportifs traditionnels (hors sites et espaces des sports de nature) et gèrent 68% de ce parc.

Ce rôle prépondérant s’élargit progressivement aux intercommunalités : 62% des EPCI ont déjà inscrit dans leurs statuts une intervention sur les équipements sportifs. La compétence est optionnelle pour les communautés de communes et d’agglomération, mais obligatoire pour les communautés urbaines et les métropoles. La mutualisation est d’ailleurs souvent indispensable pour la construction d’équipements sportifs importants : piscines, patinoire, (grand) stade, palais omnisports, etc. La mutualisation est légitime quand se conjuguent la rareté de l’équipement, la notoriété des usagers, le niveau important des compétitions organisées, et la centralité géographique de l’équipement par rapport au territoire concerné.

Un programme concerté d’investissements peut être un vrai enjeu intercommunal.

Des insuffisances au niveau local

Ce maillage local à l’échelle communale et intercommunale n’exclut pas d’importantes inégalités territoriales: la moyenne nationale est de 40 équipements sportifs pour 10 000 habitants. Elle chute cependant à 23,7 en Ile-de-France, 23,6 en Guadeloupe, 23,5 en Martinique et 20 dans les zones urbaines sensibles. Par le biais du Centre National de Développement du Sport (CNDS), l’Etat prétend corriger ces inégalités locales. Mais les subventions qu’il distribue souffrent selon la Cour des Comptes d’une trop forte dispersion qui en atténue la portée. Par ailleurs, dans la pratique, seuls 35% de ces investissements concernent effectivement des territoires défavorisés. Il est donc illusoire d’espérer à court terme un recours à l’Etat pour pallier les déficits locaux les plus importants.

Autre motif d’inquiétude ! Une proportion considérable d’installations sportives ne répond pas aux normes actuelles d’hygiène, de développement durable, d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite, sans parler des besoins en termes de fonctionnalité et de confort. Un effort sans précédent de modernisation et réhabilitation doit être entrepris dans l’ensemble du territoire.

Une réflexion doit aussi être menée pour rendre accessibles les équipements locaux aux sportifs (et particulièrement aux jeunes) qui privilégient la pratique auto-organisée non encadrée (hors cadre scolaire ou associatif).

 

Des priorités fortes pour les élu/es écologistes

  • Privilégier des équipements sportifs de proximité, accessibles, permettant des pratiques diverses, notamment celles de loisirs ou liées au bien être ;
  • Préférer les gestions publiques et municipales en régie (permettant notamment l’application du quotient familial) aux gestions privées ;
  • Limiter le recours au Partenariat Public Privé ;
  • Questionner le modèle associatif dans la gestion des équipements et réfléchir à un mode de gestion coopératif (associations, salariés, usagers) dans le cadre de Sociétés Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) ;
  • Limiter les investissements publics des structures réservées au sport professionnel ;
  • Réduire les impacts environnements des équipements, également lors de leur construction, rénovation ou agrandissements ;
  • Concerter les futurs utilisateurs (usagers) lors d’une programmation (clubs, écoles, associations de jeunesses, de seniors, handi…) ;
  • Respecter les trames vertes et bleues, les zones Natura 2000 lors de l’émergence de projets d’aménagements de sites en milieux naturels ;

 

Des initiatives concrètes et innovantes avec des élu/es EELV

A Montreuil (93), un bassin naturel avec système de filtration plantée est en cours de construction. Courant à l’étranger, notamment en Allemagne, il constitue une première dans une grande ville française. Le bassin naturel en extérieur, prévu pour 2014, sera notamment accompagné d’un autre bassin couvert avec système de désinfection par électrolyse au sel (plus sain pour les nageurs que l’usage exclusif du chlore).

Au final, les progrès énergétiques permettent de réduire de 40% le budget de fonctionnement par rapport à une piscine classique.

Coût du chantier : 15 millions d’euros hors taxes + 4 millions d’euros d’aménagements locaux. Le projet a bénéficié de nombreuses subventions croisées.

Dans le 2e arrondissement de Paris, la mairie écologiste a mis en place un espace de glisse (skate, roller…) dans une rue fermée à la circulation. C’est un moyen original de favoriser la pratique sportive de proximité en zone urbaine dense. Léger bémol : certains riverains se sont plaints de nuisances sonores.

A Ingré, dans le Loiret, un aménagement de 3 circuits pédestres, en concertation avec les 3 associations communales de randonnée a été réalisé. Ces chemins permettent de valoriser, à travers des panneaux et des jeux, la biodiversité, le patrimoine local et l’histoire de la commune. Ils sont utilisés massivement lors des 3 randonnées pédestres annuelles et en loisir par les familles et par les écoles au fil de l’année. Ces chemins sont valorisés dans un topoguide édité par la Fédération Française de Randonnée Pédestre et sont intégrés dans le Plan Départemental des Itinéraires de Promenade et de Randonnée (PDIPR).

 

Les dérives du « sport business »

Les collectivités s’impliquent aussi dans la construction et la gestion des grands stades dédiés au sport-spectacle. Dans un rapport publié en 2009, « Les collectivités territoriales et les clubs sportifs traditionnels », la Cour des Comptes épingle le manque de rigueur de la plupart de ces soutiens. Elle pointe « de nombreuses irrégularités, de l’occupation sans titre du domaine public à l’absence ou au versement d’une redevance symbolique ». La Ville de Paris a encore subi en mars 2013 l’annulation par le Tribunal administratif d’une convention avec la Fédération Française de Tennis pour étendre le tournoi de Roland-Garros, faute d’une redevance annuelle suffisante. Les constatations effectuées par la haute juridiction laissent penser que les collectivités cherchent moins à valoriser leur patrimoine qu’à alléger les charges d’exploitation des clubs professionnels et à leur accorder ainsi un concours financier indirect.

La Cour des Comptes s’inquiète aussi des risques financiers majeurs pris par les collectivités pour la construction de nouveaux stades notamment par le biais de partenariats public-privé (PPP). En avril 2011, le député Bernard Depierre (UMP) a aussi déposé une loi permettant aux stades gérés par un bail emphythéotique administratif (BEA) de recevoir des aides publiques (impossible avant). Cette loi sur mesure avant l’accueil de l’Euro favorise ainsi la participation financière des collectivités.

Si les collectivités veulent s’engager dans la rénovation de leur stade, d’autres statuts juridiques sont disponibles, impliquant à divers degré la collectivité : maîtrise d’ouvrage publique (MOP), concession de service publique (CSP), ou initiative privée (qui n’exclut pas, dans le cas lyonnais, une participation des collectivités aux aménagements locaux…). La Cour des Comptes est plutôt favorable à la privatisation de ces investissements dont les premiers bénéficiaires sont les clubs résidents.

Consommateurs de ressources publiques, foyers de nuisances pour les riverains, sources potentielles d’atteinte à l’environnement, les grands stades posent de nombreux problèmes aux écologistes. Leur agrandissement pose question alors que le taux de remplissage des stades de football est d’environ 70% en Ligue 1 ces dernières saisons.

Les écologistes ont notamment dénoncé le projet d’« OL Land » (football) à Lyon ou les nouveaux grands stades de Lille et Bordeaux. Selon l’Association nationale des élus en charge du sport (ANDES) l’Euro 2016 coûtera plus d’un milliard d’euros d’effort financier aux collectivités territoriales (ce qui n’est pas une fatalité : Strasbourg, Nancy, Rennes et Nantes ont refusé ou renoncé à participer à l’accueil de cette compétition…).

L’Euro a aussi coûté 160 millions d’euros au CNDS, pillé de ses ressources au détriment du sport pour tous. Enfin, loin de se cantonner au ballon rond, les excès touchent aussi l’ovalie : une inflation touche l’Ile-de-France avec notamment le projet de la Fédération Française de Rugby de réaliser sa propre enceinte de 80 000 places en Essonne.

Face à ces investissements somptuaires à l’utilité publique souvent douteuse, les écologistes ont un rôle politique majeur à jouer. Ils doivent inviter à la sobriété et à la solidarité des territoires, contre la multiplication des égoïsmes locaux.

Outre la vétusté de ses stades, la France connaît (plus problématique) un déficit de salles de sport importantes. Les salles classiques sont amenées à laisser la place à des Arenas, multifonctionnelles, plus rentables (et donc moins tributaires des subventions publiques) accueillant notamment spectacles sportifs, concerts et bureaux ou salles de réunions, même si là encore des problèmes de légitimité de ces investissements se posent localement.

Ex : grand Arena de Bordeaux (10 000 spectateurs pour le handball, 14 500 pour le basketball, 15 000 pour des concerts).

Arena de Montpellier reçoit : matches de Ligue des Champions de handball, un tournoi professionnel de tennis, des concerts et des congrès.

 

Pour aller plus loin

– JF Bourg et JF Nys, Clubs sportifs et collectivités territoriales : enjeux, modèles, partenariats, stratégies, PUS, 2012

– « Sport pour tous et sport de haut niveau, pour une réorientation de l’action de l’Etat », rapport de la Cour des Comptes, janvier 2013

– Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels, rapport de la Cour des Comptes, décembre 2009

– « Intercos : des stratégies sportives à la carte », La Gazette des Communes, 4 février 2013

 

[1] « Les collectivités territoriales et les clubs sportifs traditionnels », rapport de la Cour des comptes publié en décembre 2009