Motion portée au Conseil fédéral d’EELV des 11 et 12 octobre 2014
Exposé des motifs
Le Comité international Olympique (CIO) recueille d’ici septembre 2015 les candidatures des villes candidates à l’accueil des Jeux Olympiques d’été 2024.
En France, malgré les échecs récents et successifs de Lille 2004, Paris 2008 puis 2012 et Annecy 2018, une large part des acteurs sportifs se mobilise actuellement pour fédérer autour de la métropole du Grand Paris une nouvelle candidature française pour 2024. Une étude d’opportunité du projet doit ainsi être rendue publique au début de l’année 2015.
Un tel projet suscite d’emblée la méfiance des écologistes, tant les impacts environnementaux, financiers, commerciaux et sociaux associés à cet événement sont importants et souvent à l’exact opposé de nos ambitions, comme l’exemple des JO de Sotchi l’a récemment confirmé. Les dérives inhérentes à ces grands événements sont clairement identifiées: publicité à outrance, privatisation d’une large part des bénéfices après des dépenses publiques somptuaires, bilan carbone désastreux, autoritarisme et opacité de la gouvernance du CIO, risque important de perversion des valeurs du sport (paris truqués, dopage…), expulsion des populations locales pour laisser place aux infrastructures sportives, etc.
Néanmoins, l’exemple des JO de Londres (2012) a récemment montré qu’il existait des marges importantes pour améliorer l’héritage social, économique, environnemental et urbain du projet. La capitale britannique a été vivement critiquée pour avoir accepté des sponsors anti-écologiques tels que British Petroleum et Dow chemical ; elle n’a utilisé pendant l’événement que 9% d’énergies renouvelables (contre 20% annoncés).
Mais un bilan global et objectif doit aussi rappeler qu’elle avait mis en place dès sa candidature un plan de développement durable visant notamment à pérenniser les installations sportives (ou dans le cas contraire àles rendre temporaires), requalifier une partie de l’Est de son territoire, tenir une gestion des déchets exemplaire…. Une commission indépendante a suivi le respect de ces engagements initiaux. La réhabilitation et la dépollution de sites industriels à l’abandon ont été saluées, comme la traçabilité des achats, la végétalisation d’une partie du site et la construction de logements.
L’accueil des Jeux Olympiques est donc par nature ambivalent. Certes : même avec un cahier des charges environnemental extrêmement solide, le transports des spectateurs, des sportifs, de leur encadrement, des journalistes, comme la diffusion massive (TV, Internet) de l’événement annoncent immanquablement un bilan carbone exorbitant. Le problème qui se pose aux écologiques est : est-il préférable de ne cautionner à aucun prix un tel événement sur notre territoire ou de l’accueillir pour chercher à en tirer profit (urbain, social, économique) tout en en minimisant l’impact environnemental ?
Pour la métropole du Grand Paris, une vision optimiste considèrerait l’événement comme un moyen d’incarner le projet métropolitain (aujourd’hui essentiellement technocratique et éloigné des citoyens), d’accélérer la mise en œuvre de certains projets d’urbanisme et notamment de transports en commun, de favoriser le développement local de territoires métropolitains moins privilégiés, de « recycler » les projets de grands équipements sportifs prévus (mais pas toujours conçus) lors de la précédente candidature pour les JO 2012, de bénéficier d’un effet d’entraînement sur la pratique sportive de proximité, voire de donner l’opportunité à la France d’améliorer la responsabilité sociale et environnementale d’un événement international devenu incontournable.
D’autres grandes villes comme Barcelone (1992) ont su capitaliser sur l’événement pour accélérer la rénovation urbaine d’une partie de leur territoire.
Pour espérer remporter la course à la sélection organisée par le Comité international Olympique, la France devrait dépenser environ 100 millions d’euros pour réaliser son dossier de candidature (!) et fédérer une parfaite unité sportive, politique, économique, associative et citoyenne autour du projet.
Les spécialistes internationaux considèrent les chances de réussite de la France comme sérieuses… mais restreintes. Le pays est certes reconnu pour son savoir-faire dans l’organisation de grands événements sportifs – il accueillera notamment l’Euro 2016 de football- mais son influence dans les grandes institutions sportives internationales demeure insuffisant. Des concurrents très crédibles sont par ailleurs annoncés : Etats-Unis, Qatar, Afrique du Sud…
Aussi le pari est d’emblée extrêmement risqué : en pleine période de crise des finances publiques, la France ne peut pas se permettre de gaspiller 100 millions d’euros d’argent public pour une candidature « d’échec ».
Les précédentes candidatures françaises ont souffert de la verticalité des processus de décisions, initiés par les décideurs politiques et industriels plutôt que par les populations concernées. Cette gouvernance obsolète a particulièrement nui à la candidature d’Annecy pour les JO d’hiver 2018, qui n’a jamais réussi à fédérer les populations locales autour du projet.
Aussi, la priorité pour les écologistes pourrait être d’innover sur la méthode : impulser la décision par le bas, via un referendum. C’est un préalable indispensable si une candidature veut s’assurer des chances de succès et une exigence démocratique en période de restriction budgétaire.
Réaliser un référendum à l’échelle francilienne, après plusieurs réunions publiques thématiques appuyées par l’étude d’opportunité du CNOSF, est au passage une opportunité locale de contribuer à la consolidation d’une identité commune, métropolitaine et francilienne. Selon les règles constitutionnelles, seul un « OUI » majoritaire porté par une participation de plus de 50% des électeurs et électrices inscrit/es vaudrait décision pour la Région Ile-de-France (mais n’engagerait pas officiellement l’Etat).
Une telle décision n’empêche pas EELV de porter un regard critique pendant la campagne d’information précédent le referendum, ni de proposer un cahier des charges particulièrement exigeant sur les aspects démocratiques, financiers, sociaux et environnementaux du projet.
Motion
Le conseil fédéral réuni les 11 et 12 octobre 2014 :
-‐ rappelle les inquiétudes budgétaires, sociales et environnementales inhérentes à toute organisation de grand événement sportif international;
– considère que la réalisation de Jeux Olympiques de la métropole du Grand Paris ne serait acceptable qu’avec un cahier des charges urbain, social, budgétaire et environnemental extrêmement ambitieux
-‐ demande la tenue d’un ou plusieurs référendums locaux francilien(s) au début de l’année 2015, après la publication de l’étude d’opportunité réalisée par le mouvement sportif, quant à la candidature de Paris àl’organisation des Jeux Olympiques 2024
-‐ demande aux élu/es nationaux et locaux de soutenir dans leurs institutions respectives l’organisation de ce(s) referendum(s)